L’INDUS

Fleuve nourricier, comme le Nil ou dans les temps anciens, l’Euphrate et le Tigre, l’Indus est un miracle. Un miracle de vie et de prospérité – pensons à la formidable civilisation de l’Indus qui a vu le jour il y a quatre millénaires sur l’actuel Pakistan et Inde alors qu’une grande partie du reste du Monde découvrait à peine l’agriculture et commençait à s’organiser en sociétés complexes. Ce miracle a fait perdurer cette civilisation très avancée pour son temps pendant près de deux millénaires, en fournissant de l’eau dans un climat peu clément : les températures peuvent atteindre les 50°C par endroit en été et les pluies de la mousson sont timides, quand elles ne sont pas torrentielles et dévastatrices.

Un miracle de beauté aussi : qui a vu les rives de l’Indus, Alexandre le Grand par exemple, peut témoigner de la beauté saisissante du spectacle d’un fleuve puissant, dopé par la fonte des neiges et des glaces, puis de la mousson chaque été, coulant à l’ombre des plus hauts sommets du Monde, dans un paysage tantôt froid et aride, puis abondamment arrosé et chaud et enfin rudement chaud et aride. Le fleuve naît au Tibet, sous contrôle chinois, passe en Inde, dans ce désert froid de haute altitude qu’est le Ladakh puis continue son chemin vers le Karakoram au Pakistan, sous l’oeil des quatre sommets à 8000 que compte la région, surnommée “Troisième Pôle” tant elle est prise dans la glace. Une fois passées ces hautes montagnes, le fleuve pénètre un autre monde, plus vert, humide et végétal, dominé par la mousson avant d’atteindre la grande vallée fertile qui porte son nom. 

On ne peut pas parler de l’Indus sans mentionner le Punjab, toponyme hydrologique s’il en est, venant du Persan (پنج, Panj, “cinq” et آب, ab, “eau”), évoquant les 5 rivières qui convergent dans cette terre à l’histoire guerrière et agricole intense, faisant d’elle un des cœurs battants du Monde indien, niché au creux des branches de l’arbre.

Devenu aujourd’hui un dédale de canaux conçus par les britanniques, l’arbre fleuve est en plus de cela fortement perturbé par les nombreuses retenues d’eau et barrages servant à produire de l’énergie, sans parler des glaciers dont l’Indus tire son flux vital : ils s’amenuisent. Nous voici donc devant un arbre à observer de près : ses habitants courent un danger grandissant, entre vagues de chaleurs plus intenses d’années en année, fonte des glaciers et moussons surpuissantes causant des inondations terribles.

Alors, quel arbre pour représenter l’Indus ? Le genévrier semble tout indiqué : arbre prisé pour l’encens des différents rites que renferment les montagnes et auréolé de spiritualité, il est robuste, résistant à la sécheresse et pousse en altitude, isolé, comme l’Indus : arbre-fleuve relativement isolé.

Le genévrier Indus, Juniperus Indus

le fleuve-arbre au microscope :